Paris, le 27 février 1893 Mon bien cher Camille, Je suis heureux de penser qu’à l’heure actuelle vous devez être complètement débarrassé de votre terrible maladie, grâce à votre solide constitution et aux bons soins de votre dévouée et vaillante compagne. Pour moi, malgré l’arsenic, la quinine, la coca, le phosphore et l’eau de Vichy, je ne vais pas aussi bien que je le voudrais. À l’heure où je vous écris, j’ai les deux mains comme des pastèques, et cette diable d’enflure indolore et fugace, à laquelle les médecins ne semblent rien comprendre, ne laisse pas que de m’ennuyer fort. La véritable cause de ce mal, à mon avis, est l’état moral où je me trouve plongé depuis plus de huit mois. La faiblesse des uns, l’indifférence et la mauvaise foi manifeste des autres, voilà où j’en suis, débattant depuis bientôt dix mois de cette attente en France. Cependant, il semble que la partie soit plus sérieuse qu’auparavant. Je persiste à croire qu’un jour viendra la réparation de l’injustice commise, et que je retrouverai ma position. Il faut espérer. Votre bien dévoué frère, Jules Herbovy