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Draguignan, le 24 Février 1891.
Ma chère Marie,
Je réponds deux mots à ta bonne lettre : la chère Anéloi a bien eu une sorte de fièvre muqueuse très-légère, mais c'est à peu près fini, elle n'a plus qu'à reprendre ses forces rapidement parties. Magdeleine se porte comme un charme ainsi que Marguerite. Seule, cette sorte de Marie a besoin de soins : la chère a les bronches faibles, elle s'enrhume trop souvent. Elles sont toutes bien gentilles. Henriette va enfin pouvoir se reposer, ce qui n'est pas trop tôt. Louis se porte bien, sauf quelques fréquentes fatigues d'estomac, héritage du siège de Paris.
Quant à moi, je me fortifie ; cependant les croûtes des plaies des pieds ne sont pas encore tombées, et tous les soirs mes jambes sont fortement enflées. Il me faut continuer à combattre l'éléphantiasis par les bons légumes et par le fer. Puis reviendront les sels de Vichy, enfin j'espère que la fièvre disparaîtra.
Chaque matin je vais faire une course de 4 à 5 kilomètres au soleil. La Provence renaît, mais Draguignan ne renferme absolument aucune distraction.
Merci, chère sœur Marie, de ta bonne volonté à me trouver quelque chère et bonne compagne de ma vie, mais je ne pense pas en engager si je ne suis pas nommé par le Gouvernement. Or, je n'espère pas en effet un Chef d'Exploration. D'autant plus que je repose comme tel, il y a beaucoup de chances pour que je le reçoive pas. Il m'est tout à fait impossible cette fois-là que sera-ci après une nouvelle période. Car je devrais bien alors à faire une grande exploration, afin de me poser bien loin et bien longtemps. Comme pour moi le fleuve des Munières est une sorte de défi, il est bien évident que ces gens-là ne veulent me pousser aux armements et ma carrière coloniale.
À quoi bon alors se jeter dans des dévouements inutiles et chercher une union qui n'aboutirait qu'à faire une veuve d'ici à quelques années. Quelle comédie ! Je demande quant à moi qu'on me dise si oui ou non on se fiche de moi. Quand je pense que de Chavanes, l'être de ridicule, à 22 ans et qui n'indique rien de bien troublant, après un faible voyage de deux ans, était classé et nommé résident avec 18,000 f plus une gratification renouvelée de 10,000 f, quand je compare ce que j'ai souffert avec bien de donner dans ces bureaux ou ministères ! J'ai bien peur qu'on ne me mette de côté, comme on m'a fait il y a déjà deux ans. Tout cela est véritablement désolant.
Si je puis espérer trouver un bon poste où je pourrais rester plusieurs années (par exemple, les Indes) et dans un délai raisonnable sinon cette année y faire venir ma femme, il serait cependant nécessaire que j'en fasse bientôt la demande.
Je te quitte mais je t'écrirai avant peu ; pense à ce que je te dis. Je vous embrasse tous tendrement. Mimi à tous les grands.
Ton dévoué frère,
Jules Jacquot