- Created new files for letters dated from February 16, 1893 to January 19, 1895. - Included personal updates, health concerns, and family matters. - Highlighted ongoing issues related to professional reinstatement and administrative challenges.
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E.J.S.
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9 Novembre 1875
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Ma chère petite sœur Marie,
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Ma chère petite sœur, je viens aujourd’hui adresser à toi seul mes caresses et mes plus tendres
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baisers. Je suis comme tu le sais bien, un grand bavard, et je veux aussi babiller avec toi. Je
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vais te raconter un jour entier de collège; je choisis par exemple cette journée de Mardi 9e
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jour de Novembre 1875.
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En premier lieu, voilà qu’à 5 heures du matin, au milieu d’un rêve délicieux rempli d’Exercitium,
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etc., une inévitable cloche se fait entendre, ainsi que la Bénédicamus Domino du P. Raffrenat.
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Vite, vite, je saute à bas de mon lit, à moitié endormi, en criant Deo gratias, et en me signant du signe de la croix.
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On entre alors dans notre immense dortoir de l’étude, temps épouvantable, un véritable ouragan se
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déchaîne sur nous ! On en voit un qui court après sa casquette, un autre après son gant, d’autres enfin
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après leurs correspondances. Ribault, de Violette, Honoré, de la Perraudère et moi, nous nous prenons par
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la main, et laissant voler au gré du vent nos grands manteaux, nous nous mettons à courir le plus vite
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possible du côté du vent; le vent s’engouffre dans les profondeurs du manteau, et nous faisons ainsi le tour
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de la cour avec une vitesse inouïe. Je cause un moment avec Libault. Tout à coup je vois Carrieux qui me présente
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malheureusement un dos superbe, et j’y applique ma balle de toute ma force, il me la renvoie avec ardeur dans le
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groupe gauche. Mais la cloche sonne, et nous rentrons à l’étude. Je cause quelques peu à de Vassivière, puis nous
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rions comme des fous.
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Puis je me jette à corps perdu dans l’étude de la langue anglaise, en traduisant une très difficile version
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d’Eichoff, intitulée : Le Chêne et la Glycine; nom très poétique, mais version très ennuyeuse. On dit bientôt
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l’Angelus, et je me rends au réfectoire, quand soudain je suis accosté par mon maître de musique, qui me propose
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de prendre une leçon à la place d’un élève qui est absent; je le suis, il répète la promenade et la valse.
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Bientôt je suis dans les délices de la somnambule, puis de Don Juan, de la Juive, d’Auber. Mais le cadran marque
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midi et demi, je signe et je vais déjeuner.
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Déjeuner passable; Du Boullay un des convives de seconde table se passe du premier plat.
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Puis l’on passe en récréation, le jeu est très animé; Libault reçoit des vertes parce qu’il a manqué, avec une
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rapiette, deux balles coup sur coup, un le trot continue en ardeur.
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La cloche sonne, puisque c’est mardi, on va en promenade, nous choisissons le chemin Ray; nous marchons ainsi, Violette
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à droite, Libault au milieu, moi à gauche.
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Durant ce bruit intercopiétion de soleil, d’ombreux, d’eau, de cascades, etc., etc.
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Holà ! Holà ! l’on est passé comme des flèches et au retour, à côté de moi un curieux étonnamment comme il est multiplié
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toute la totalité du Père Castet. Vite, le second coup se donne et j’admire Juliet, notre écolard, tel qu’on a admiré un
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second sur la porte. Je voudrais dire le gymnase. Deuxième hypothèse dont la hâte et chaque insolite se contredisent.
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Il ne saurait pour me donner de lui tout entier, mais quand il aperçoit, il court rapidement d’aller au matin. Pour lui apprendre
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à être ainsi loyal, je lui envoie dans les côtes un coup de poing, qui lui fait découvrir sous sa redingote un os que je
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n’oserais, qui est au dos et l’écolier est un peu fou rire.
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On arrive à l’étude avant la prière, j’ai eu le temps de faire toutes les fatigues de ma version de Vassivière, qui pour son
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bon amusement, s’exerce plus que de nouveau à mot d’allemand. Tous les écoliers arrivent, la prière commence, tout est calme.
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Après la prière lecture spirituelle. Singulier, l’étude commence. Je regarde dans la préface de la Vassivière qui d’une belle chemise
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commence lui, retirant un mot et répété. Je le lui demande, et quelques minutes après, je le lui renvoie avec cette explication
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si magnifique. Je me mets à Orgele. Après avoir fini un chapitre, mon profit d’une moitié sur l’autre en explication. Je trouve ce fidèle
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puis me sourit l’oreiller, je le remercie d’un geste plein de reconnaissance.
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Puis je me plonge dans l’état monotone du Branché et du Gothlandtage. Ô Dieu, Dieu, Dieu, le froid et l’état demi vide au pupitre, bois
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débattus, ou le lit touche aussi bas, mais puisque mon chapelet est fini, que sais-je donc manger, dont j’avais un morceau de pain et
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de lard environ, ainsi que je soupire. Puis, je me précipite, je le partage encore dans toute la longueur, j’offre mon ardeur, à mes
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amis tous. Puis nous entrons dans un cercle tour à tour parlant poétique et bientôt à la main au livre de faire dans lequel nous avons
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à débattre, et cela. Il me fallait de ma logistique. Lundi, je juge.
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Les vers de David sont beaux, il y a du souffle poétique. Mais la cloche sonne, nous voilà en cours, il pleut, je me sauve sous les hangars;
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j’accoste alors Genest, qui me confie son admiration sur Bonnet; mais voici qu’après avoir échangé quelques mots avec mon cher petit ami
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Hébrard d’Alo, je me dirige à grands pas vers Libault, qui me parle d’une belle et chère Alice. Conversation sèche, presque très intéressante.
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L’heure sonne. Nous nous dirigeons vers la chapelle. C’est le P. Girondeville qui dit la messe, chants religieux. Je récite un chapelet selon ma
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respectable habitude, pour tous ceux qui me sont chers.
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La classe a sonné: j’y vais avec plaisir. Le Père Ganeclin professeur de Mathématiques me fait une question, à laquelle je ne puis rien répondre,
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vu que je ne vois rien au tableau. Il veut bien se satisfaire de cette raison.
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Le Père Perrin professeur ordinaire arrive, tout se passe très-bien; la cloche sonne, vite à l’étude on porte ses livres, et de là en association.
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Il fait une version d’Eichoff, intitulée : Le Chêne et la Glycine, nom très poétique, mais version très ennuyeuse. — On dit bientôt l’Angelus, et je
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me rends au réfectoire. Quand soudain je suis accosté par mon maître de musique qui me propose de prendre une leçon à la place d’un élève qui est
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absent, je le suis, il répète la promenade et la valse.
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Bientôt je suis dans les délices de la somnambule, puis de Don Juan, de la Juive, d’Auber. Mais le cadran marque midi et demi, je signe et je vais
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déjeuner.
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Bientôt cependant le temps se couvre, épouvantable nous monte de la tête au pied, nous sommes en désordre.
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Nos figures expriment l’ennui, la fureur. À quatre heures et demie, nous rentrons au collège, mouillés, n’en pouvant plus: nous dévorons notre
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pain et nous allons changer de souliers.
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Nous rentrons à l’étude; quelques minutes après mon voisin de dos souffle à fourgés pleurs. Son sommeil est pénible!
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Nous avons à faire un horrible thème grec, infligé aux élèves indolents. Cependant je travaille bien car je pense à mon cher papa et mes sœurs, à mon
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frère bien-aimé, et puis à ma chère Ernestine.
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Quand tu la verras, ma petite chérie, embrasse bien pour moi Jules, et fais-lui quelques petites commissions dont je t’avais chargée pour elle en particulier.
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N’oublie pas l’image et la petite lettre pour l’oiseau absent qui manquerait à vos réunions, il faut que tu me les envoies tous deux un jour de l’an prochain.
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Bien des choses à Madame Alexandrie, à Clémentine, et à Alice, ainsi qu’aux autres Saint-Marc et Agaceaud.
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Enfin, ma chère petite Marie, je finis cette longue épître, en espérant bien en recevoir une semblable bientôt. J’ajouterai seulement qu’ici le temps est
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épouvantable, le vent malgré les volets casse les carreaux au dortoir, ce qui force les surveillants à accourir en bonnet de coton. Pères Raffrenat,
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Henricane, Castet.
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Détail charmant: Papa doit quelque peu de quantité de pommes qui se trouvaient dans la campagne, et bien! l’eau, la grêle, le vent, les arbres secoués par
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le vent ont fait tomber toutes les pommes, les ont entamées, si bien que les rues du Mans sont pleines de pommes, bonnes affaires pour les pauvres.
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Je finis cette longue lettre en t’embrassant avec tout l’amour que j’aime: Papa, Henriette, Émile, Ernestine.
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Ton frère affectueux et dévoué
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Jules Bontoux
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